Turquin
Mardi 26 nov. 2024 - ARTCURIAL PARIS - Paris
Antonio BALESTRA (Vérone, 1666 - 1740)
L'éducation de l'Amour
Toile
100 x 83 cm
en bois sculpté et doré, de style Louis XIV
Estimation : 40 000 - 60 000 €
Provenance :
- M. Barbier de La Bonnetière, Nantes (selon le catalogue de la vente de 1894, la collection aurait été formée lors de voyages en Europe avec le diplomate François Cacault vers la fin du XVIIIe siècle) ;
- Par succession à la baronne de La Tour-du-Pin Chambly, petite fille de M. Barbier de La Bonnetière, Nantes (selon le catalogue de la vente de 1894) ;
- Par succession au baron Charles Gabriel René Berlion de La Tour-du-Pin Chambly de La Charce (1820-1891), Nantes ; sa vente après-décès, Paris, Hôtel Drouot (Me Duchesne), 26 février 1894, lot 20 (comme Sebastiano Conca), adjugé 340 francs ;
- roi Carol II de Roumanie (1993-1853) ;
- Vente de la collection de M. Victor Guibert du Château de Cabrières (Aveyron), Paris, Palais Galliera (Mes Maurice et Philippe Rheims), 8 décembre 1964, lot 13 (comme attribué à Sebastiano Conca) ;
- Acquis à cette vente par les parents de l'actuel propriétaire.
Oeuvres en rapport : Une autre version de cette composition appartenait à la collection Giancarlo Gallino (112 x 98 cm, datée vers 1710-1715, L. Ghio, E. Baccheschi, Antonio Balestra, in Pittori Bergamaschi, Il Settecento, Bergamo 1989, II, p. 219, n°121; p. 284, fig. 3). Une autre réplique est passée en vente au Dorotheum à Vienne le 9 juin 2020, lot n. 92, en paire avec un tableau représentant Zéphyrs, Flore et Cupidon (huile sur toile, 112 x 98 cm).
Né à Vérone, Balestra se forma à Venise, à vingt ans, auprès d'Antonio Bellucci, dont il conserva toujours le large sens décoratif ; puis il séjourna à Rome à partir de 1690, y fréquenta l'atelier de Carlo Maratta, dont l'influence sera déterminante pour lui et dont il s'appropria cette grâce corrégienne qui le distingue. Au cours des deux premières décennies du XVIIIe siècle, après s'être établi à Venise, il rencontre un succès européen en réalisant des sujets religieux et mythologiques : sa peinture fluide et gracieuse a été très recherchée en Allemagne, en Angleterre, en Hollande et au Danemark. Il tempère le classicisme de ses maîtres par la connaissance des artistes rococo, Giovanni Antonio Pellegrini et Jacopo Amigoni. Au cours des années 1720, il retourna à Vérone, où il reçut en 1725 l'annonce de son élection à l'Accademia di San Luca à Rome.
Notre toile représente l'éducation du jeune Cupidon par Vénus et Mercure, un thème dont l'iconographie avait été fixée par la célèbre représentation du Corrège (National Gallery de Londres). A l'artiste de Parme, il emprunte aussi le luminisme, irradiant depuis le centre, de l'Adoration des bergers, dite la Nuit (Dresde, Gemäldegalerie). Ce thème n'est pas tiré de la mythologique grecque mais de l'Ars Amandi (Art de l'amour) d'Ovide, est devenu particulièrement populaire dans la peinture baroque, comme en témoignent les œuvres de Nicolas Chaperon (Paris, musée du Louvre), François Boucher (Berlin, Charlottenbourg). On découvre souvent sur la feuille d’étude de l’enfant des représentations de croquis mathématiques ou de géométrie, deux « arts libéraux » indispensables à la construction des arcs et aux calculs de l'angle des flèches, dont se sert l’Amour.
Probablement, notre peintre connaissait l'une de cinq versions de ce thème par Benedetto Luti (1666-1724). La plus connue est conservée à Pommersfelden, Schloss Weissenstein (l'auteur de la monographie sur Luti la décrit comme une « Sacra Famiglia Pagana » qui s’appliquerait aussi à notre composition). Antonio Balestra modernise le sujet dans le style rocaille de son temps, plus tendre, plus féminin.